Le MODEM sombre et la France avec (lundi, 15 mars 2010)

Hier soir, la soirée était invraisemblable. Lorsque je suis arrivé en préfecture d'Annecy pour voir les résultats des communes du département je suis tombé sur un parlementaire UMP qui exultait ! L'UMP était en tête au Grand Bornand. Ce parlementaire était à la fête parce que le Maire UMP du Grand Bornand qui avait rejoint Jean-Jack Queyrane n'avait pas réussi à convaincre ses électeurs de le suivre. J'ai pensé au titanic et à son orchestre. La France s'enfonce dans une crise sociale et politique sans précédent et ce dérisoire parlementaire se réjouit de la victoire du parti présidentiel au détriment d'un Maire dans l'une des 36 000 communes de France.

Devant les journalistes, le théâtre d'ombre de la vie politique française repartait de plus belle. Pendant que l'écrasante majorité des Français se préoccupent de leur dramatique quotidien en ignorant la classe politique, la droite et la gauche ont continué de plus belle à se crêpé le chignon, se renvoyant la faute de cette désaffection historique.

Pour le MODEM la soirée était encore plus sombre. Totalement marginalisé. Le courant de pensée centriste sera privé de représentation politique dans les régions après l'avoir été du Parlement. Ce ne sont pas quelques élus précédement centristes et désormais à la botte de l'UMP qui changeront quoique ce soit.

Les électeurs que nous avons rencontrés nous ont dit pourquoi ils n'iraient pas voter :

1) "Tous les politiques sont les mêmes. Ils cherchent avant tout à se faire élire. Ensuite on ne les voit plus." Un vieux refrain des campagnes mais qui a cette fois-ci touché attteint un sommet. On peut le comprendre avec des partis UMP et PS dont les élus nationaux sont soumis à une discipine de vote qui les conduit à déserter le terrain. Les permanences du député UMP sont des rendez vous factices auxquels seuls 2 ou 3 personnes se donnent la peine d'aller plutôt par compassion que par intérêt. Le Maire PS de Saint-Julien a lui carrément trouvé la solution : il ne fait plus de permanence. Il ne reçoit plus les habitants.

2) "On a entendu parlé de Frêche et d'Ali Soumaré mais pas des propositions.". Pourtant les propositions étaient là.. mais la presse n'en a pas parlé. Nous avons eu un débat entre les têtes de liste départementales mais seuls deux journalistes sont venus.. pour prendre une photo et puis s'en sont allés. La couverture presse de la campagne a été deux fois moins élevée qu'en 2004. A côté de l'abstentionnisme des journalistes à la campagne, les électeurs eux, se sont déplacés en masse. Hier soir sur TV8 Mont Blanc j'ai pu parlé pendant environ 10 minutes pour analyser les résultats.. autant de temps de parole que j'ai eu pendant 2 mois pour présenter nos propositions !

3) "Pas la peine de voter, tout était déjà joué". Le bombardement des sondages dans les dernières semaines ont achevé de convaincre de nombreux électeurs que ce n'était pas la peine d'aller voter puisque les jeux étaient déjà faits. Ils ignoraient qu'en réalité certains partis profitent de l'abstention : l'UMP et le PS dont les électorats votent systématiquement et le FN dont les électeurs se réfugient dans les isoloirs pour exprimer leurs idées. Il ne s'est pas trouvé de journalistes dont le sens de l'éthique ait été suffisant pour informer leurs lecteurs que plus de la moitié des électeurs n'avaient pas encore d'opinion et que la moitié de ceux qui en avaient, affirmaient être susceptibles d'en changer. Les sondages sont en partie des prophéties autoréalisatrices organisées par des instituts payés par l'Elysée et des journaux propriétés de groupes amis.

4) Enfin, et surtout il y a des questions plus fondamentales sur la capacité de la politique a influencer la société. Faire l'effort d'aller voter, de se renseigner et de choisir à un sens lorsqu'il s'agit de faire un choix de société. Mais celà a beaucoup moins de sens pour choisir des orientations de gestion. Les élus ont désormais moins d'influence que les milieux de la finance. Les élus ne parviennent pas à imposer la volonté populaire sur les bonus des traders. Ils ont été contraints de sauver des banques qui se sont remises à faire les mêmes dérives immorales. Pour regagner la confiance des électeurs les élus devront ruer dans les brancards et prouver qu'ils sont capables à nouveau d'imposer la souveraineté démocratique sur la souveraineté financière. Ils devront prouver que la politique n'est pas seulement affaire de gestion mais affaire de valeur et de vision de la société. Ils devront redonner confiance dans l'avenir.

L'échec du MODEM est profond et lourd. Il est aussi partagé par l'UMP qui s'enferme dans sa trappe à 30% des voix qui ne constitue pas une majorité. Après les régionales de 2004, les cantonales de 2004 et 2008, les sénatoriales de 2008, les municipales de 2008, l'UMP s'apprète à nouveau à perdre encore une fois un deuxième tour. Elle perdra quelques départements supplémentaires dans un an. Mathématiquement, la très archaïque union de la gauche sera majoritaire au Sénat en septembre 2011. L'UMP continuera de perdre des élections tant qu'elle sera incapable d'accepter que les voix libres sont plus utiles que les voix soumises. Elle continuera d'en perdre tant qu'elle sera arrogante.

Le score du PS n'est glorieux que relativement à la faible participation. L'espoir de l'UMP et du PS réside dans leur capacité à attendre l'échec de l'autre. A récupérer le pouvoir dans une spirale infernale de désaffection politique mutuelle, successive et respective. L'alternance des incompétents.

La France va mal. On peut craindre le pire lorsque les institutions politiques ne sont plus à même d'organiser le débat national. Lorsque la politique cesse d'être représentative. Nous nous approchons un peu plus de la crise de régime.

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