Un peuple renonce à désigner le chef de l'exécutif (jeudi, 01 juillet 2010)

L'élection du Président de la République au suffrage universelle en France est catastrophique. La constitution encadre le pouvoir d'un chef d'état, mais dans les faits, son élection au suffrage universel direct tend à lui accorder une légitimité exorbitante et donc des pouvoirs exorbitants.

Le régime français s'apparente actuellement plus à une monarchie élective qu'à une république. Cet effet est très largement renforcé par deux phénomènes nouveaux : 1) la concommitance des élections présidentielles et législatives qui a conduit à soumettre la légitimité politique des députés à celle du président de la république et 2) le fait qu'un seul parti ait une majorité à l'Assemblée nationale - phénomène nouveau en France depuis 2002 à l'exception de 1981.

De fait le président de la république cumul la totalité des pouvoirs exécutifs, mais aussi détermine le pouvoir législatif et à une influence excessive sur les pouvoirs judiciaires, économiques (au travers d'institutions publiques) et médiatiques. Les contre pouvoirs qui assurent au débat public un peu de transparence et d'esprit critique sont réduits.

Il est dangereux dans un système démocratique de concentrer autant de pouvoirs dans les mains d'une seule personne. Ségolène Royal autant que François Bayrou autant que Nicolas Sarkozy. Toutes les démocraties ont des contre-pouvoirs... et toutes les démocraties européennes sont des démocraties parlementaires. Il n'y a guère que la France a être représentée par son chef d'etat lors des signatures des traités européens. Les autres sont représentés par leurs chefs de gouvernement issus du parlement.

Le diagnostic est largement partagé parmi les politiques français.. mais aussitôt suivi d'un "C'est irréversible, car on ne pourra pas demander au peuple de renoncer à élire le chef de l'exécutif".

Les faits ont donné tort à ces gens là. Cette semaine les Kirghizes, ont renoncé à désigner le Président de leur exécutif. Ils ont renoncé à un régime présidentiel car ils en ont vu tous les effets pervers : dérives dictatoriales et clivages sociaux entretenus par les candidats au pouvoir suprême dans leur quête du pouvoir. Ils ont au contraire souhaité un régime parlementaire. Les Malgaches font aussi l'amère expérience du régime présidentiel.

Il y a des pressions contradictoires fortes : d'un côté une pression médiatique qui conduit à la personnalisation du pouvoir et donc à sa présidentialisation mais de l'autre l'émergence tout aussi forte d'une société civile qui exige de participer à la démocratie conduit elle à une déconcentration du pouvoir et donc à un régime parlementaire.

Nous devrons renoncer à la concentration excessive des pouvoirs. Nous devrons beaucoup plus appuyer le pouvoir de la République sur un Parlement nouveau, plus fort, plus indépendant, moins pléthorique, plus responsable et plus présent.

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