Comment décoder les sondages pour la présidentielle ? (mercredi, 18 janvier 2012)

On va entrer dans la période durant laquelle la presse française va faire ses choux gras de la parution quasi quotidienne des sondages. Cela va détourner le débat des sujets de fonds comme le logement, la croissance, les exportations, l'éducation.. etc..etc.. c'est un peu comme si un supporteur de foot passait tout le match à regarder le score à l'écran plutôt que le match !

Cela vaut tout même la peine d'offrir quelques clefs de lecture pour ne pas se laisser manipuler par des chiffres qui n'ont aucun sens : la plupart d'entre vous ne savez pas encore vous-même pour qui vous allez voter.. comment les instituts de sondage pourrait vous informer d'une décision que vous n'avez pas encore prise.

Pour rendre l'exercice plus vendeur, les instituts ignorent l'écrasante majorité de Français qui n'ont pas encore pris leur décision pour ne se concentrer que sur le tiers de décidés. Lorsque vous lisez 25% d'intention de vote pour François Hollande, 23% pour Nicolas Sarkozy, 16% pour Le Pen et 14% pour Bayrou, il faudrait en réalité lire : 66% d'indécis, un peu moins de 10% pour Hollande, un peu moins de 10% pour Sarkozy, et environ 5% pour Le Pen et Bayrou... évidemment c'est moins excitant, moins vendeur ! Mais simplement plus proche de la vérité !

Ce ne sont donc pas les intentions de vote en valeur absolue qui sont intéressantes, mais bien leur évolution. Car lorsque Bayrou passe de 7% d'intention de vote en décembre à 14% en janvier.. cela signifie en réalité que sur les environ 10% de Français qui ont pris leur décision durant le mois écoulé, environ 28% ont choisi Bayrou : 28% c'est le chiffre nécessaire pour que les 7% qui avait pris leur décision avant décembre et ceux de décembre fassent ensemble les 14% que l'on constate en janvier. L'évolution permet de comprendre où se situe la cristalisation de l'opinion. Un chiffre d'autant plus important que les deux tiers des Français n'ont pas encore de choix définitif.

Tout cela doit être considérablement relativisé puisque 1) environ 20% des Français se décideront le dernier jour, c'est à dire bien plus qu'il n'en faut pour changer tous les résultats et 2) les échos que j'ai de nombreux maires c'est que les inscriptions sur les listes électorales cette année ont profondément bouleversé le corps électoral : on y trouve une proportion anormalement élevée de personnes qui refusaient jusque là de s'inscrire mais qui n'accepte plus le débat public tel qu'il se déroule actuellement.

L'évolution brutale des intentions de vote en faveur de François Bayrou indique donc simplement que s'il convainc dans les mêmes proportions en janvier, février, mars et avril les deux tiers des Français encore indécis qu'il ne l'a fait en décembre, il terminera avec environ 25% des voix le soir du premier tour. Un score qui le placerait en tête.

.. et voilà, moi aussi je viens de me faire prendre à regarder le score sur le tableau plutôt qu'à participer au  match !

11:12 | Commentaires (0) | |  Facebook | |  Imprimer | |