En mémoire de Vincent Lambert, des directives anticipées (jeudi, 11 juillet 2019)

Vincent lambert, directives anticipéesVincent Lambert est mort ce matin. Qu'il repose en paix. Après plus de 10 années de souffrance dans la pire des prisons : aucun mètre carré, aucune promenade quotidienne dans une cour de prison, enfermé dans le noir, sans possibilité de dialoguer avec qui que ce soit. Des conditions inhumaines. Sa mort laisse une famille déchirée par plus de 10 années de lutte judiciaire.

Que tant de souffrances ne soient pas vaines et nous conduise chacun à rédiger nos directives anticipées. Il ne suffit pas de dire à des proches qu'on ne souhaite pas d'acharnement thérapeutique. Cela ne veut rien dire tant qu'on ne définit pas précisément ce qu'on considère être de l'acharnement thérapeutique : seules la rédaction de directives anticipées permet de le définir précisément. Le dire à des proches ne permet pas de le dire à tous ses proches : seule la désignation d'un tiers de confiance permet de déterminer qui peut vous représenter en cas de perte de connaissance et de conscience. Partager ses directives anticipées avec d'autres personnes permet aussi au tiers de confiance de ne pas avoir à supporter seul le poids de leur mise en œuvre.

Il faut pour cela rédiger des directives anticipées. A peine 1 Français sur 7 a rédigé des directives anticipées. Voilà longtemps que je m'étais décidé à le faire... sans jamais en prendre le temps. Pourtant la vie m'a appris que la conscience de la mort est sans doute la meilleure manière de donner du sens à sa vie. L'agonie insupportable de Vincent Lambert m'a conduit à prendre le temps de les rédiger. Je me permets de vous le recommander également. Vous trouverez un modèle à remplir en ligne ici.

Il n'y a pas d'âge pour rédiger ses directives anticipées : la vie nous rappelle régulièrement que contrairement à nos espoirs, il n'y a pas d'âge pour mourir. Il n'y a de toute façon pas d'âge pour se préparer au seul rendez-vous assuré de toute vie qui en est sa fin.

Pour ma part, la rédaction de mes directives anticipées m'a conduit bien sûr à désigner un tiers de confiance. Elle m'a aussi conduit à préciser ce qui relevait pour moi des soins et ce qui relève de l'acharnement. Pour ma part, je souhaite un traitement des douleurs quitte à perdre la conscience et à en succomber. Tout au plus aurais-je besoin avant de mourir des derniers instants de conscience pour dire au revoir à mes proches. Je ne souhaite pas de traitement sur une pathologie que la médecine ne saurait pas soigner et qui n'aurait que pour seul effet de me maintenir dans un état de vie dégradé : durablement alité et dépendant, sans conscience, ou dans l'incapacité à communiquer. Un tel maintien en vie n'aurait pour moi aucun sens. En revanche, je souhaite une alimentation artificielle ou une respiration artificielle, que d'autres peuvent considérer comme de l'acharnement thérapeutique : je ne souhaite pas mourir asphyxié, de soif ou de faim, mais bien des fonctions vitales atteintes par la pathologie dont je pourrai souffrir.

Ces questions là relèvent à la fois du choix individuel et du choix de société. Les médecins ne peuvent pas être laissés seuls face à des cas de conscience qui iraient à l'encontre du sens qu'ils ont souhaité donner à leur vie : soigner. Un médecin hospitalier me disait un jour "les cardiologues sont des salops : ils font fonctionner le cœur sans se soucier du bon fonctionnement des autres organes". Il est certains que la médecine devient de plus en plus multidisciplinaire, mais les médecins ont aussi besoin de savoir ce que nous souhaitons pour pouvoir adapter les traitements à nos souhaits. Les directives anticipées le permettent. Encore faut-il les rédiger avant qu'elles ne soient nécessaires.

Pour que la souffrance de Vincent Lambert ne soit pas vaine, rédigeons sans tarder nos directives anticipées.

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