Assurance maladie des frontaliers : mensonges et trahisons (mercredi, 13 juin 2012)

Durant cette élection, les candidats aux législatives ont du faire face au lobbying intense du groupement des frontaliers en faveur du maintien du libre choix qui permet aux frontaliers d'être assurés par des assureurs privés. Une option qui permet aux frontaliers de payer leur assurance maladie 3 fois moins cher que les résidents suisses et les salariés en euros. En effet, les assureurs privés assurant principalement des actifs frontaliers plus souvent en bonne santé et jeune, peuvent proposer des primes 3 fois moins chères que la LAMAL ou que la sécu.

Le groupement des frontaliers a fait une grande pression sur chaque candidat sur ce sujet. Claude Birraux, député sortant et suppléant de la candidate UMP, me dit durant la campagne ce qu'il pense de ces pressions. En l'occurrence il souligne que les adhésions au groupement et ses cotisations dépendent principalement du reversement par les assureurs privés partenaires des cotisations de leurs propres assurés. Au final, une part importante du financement du groupement des frontaliers vient des assureurs privés. Sans les assurances privés le groupement des frontaliers perd une bonne partie de ses adhérents et de ses financements. On comprend mieux pourquoi le groupement défend aussi bien les intérêts des assureurs privés... et ne se préoccupe pas de préparer en faveur des frontaliers une échéance qui devient inévitable.

En totale contradiction avec les propos ci-dessus, Virginie Duby-Muller prend l'engagement illusoire de travailler à la prolongation du droit d'option et Claude Birraux sort un communiqué de presse pour faire savoir qu'il a envoyé la lettre totalement inutile de demande de prolongation au ministre de la santé qui en aura fait ce qu'il doit faire avec les demandes clientélistes : la mettre à la poubelle et faire une réponse polie pour donner le change.

Caroline Duret-Nasr, suppléante de Claude Deffaugt, me dit aussi son point de vue : "Tu as parfaitement raison de dénoncer cela, mais tu n'as aucune chance d'être élu en le disant". Claude Deffaugt a lui aussi défendu la prolongation du droit d'option. Une position sans lendemain dont la seule conséquence est qu'en 2014 les frontaliers non seulement devront payer 3 fois plus chers, comme tout le monde, mais seront les seuls à ne pas pouvoir être soignés sur leur lieu de travail.. ou à ne pas pouvoir être soignés dans les hôpitaux français car ils ne seront pas préparés.

Ces positions clientélistes sont dangereuses pour les frontaliers, pour les habitants et pour le pays. Que feront-ils une fois élus face à tous les groupes de pression auxquels les élus doivent faire face s'ils cèdent aussi facilement devant celui-ci ? Mais le plus révoltant c'est la position du candidat socialiste. Un socialiste ne peut pas défendre que les frontaliers soient les seuls à être exonéré de la solidarité avec les malades et paient trois fois moins cher que tous les autres habitants ! Et bien si ! Il l'a fait ! Lui aussi a sombré dans le clientélisme. Lui aussi a renoncé à ses valeurs, à la franchise et à l'honnêteté. Peut-être a-t-il eu le courage d'expliquer sa position aux salariés en euros lorsqu'il faisait du porte-à-porte dans les logements sociaux ?

Le front national, arrivé en troisième position, n'en a pas parlé puisqu'il n'a abordé aucun sujet local.

Tout cela n'est qu'un jeu de dupe au détriment des frontaliers eux-mêmes. Vu de Berne autant que de Paris, alors que les billatérales sont entrées en vigueur définitivement et qu'il n'y a plus de clause de sauvegarde, il n'y a plus aucune raison de maintenir une exception dont l'échéance est annoncée  depuis plus de 10 ans.

Tout cela n'est qu'un jeu de dupe au détriment des salariés en euro : ils s'intéressent peut à ce sujet et 97% d'entre eux ignorent que le candidat pour lequel ils ont voté défend l'idée que les frontaliers continuent de payer 3 fois moins cher qu'eux leur assurance maladie.

En 2014, les frontaliers seront les premières victimes de ces jeux d'intérêts dans lesquels ils se font manipuler. En 2014, faute de préparation pertinente, ils risquent fortement de ne pas avoir accès aux filières de soin sur leur lieu de travail : ils devront revenir à St Julien ou Annemasse pour un rdv de dentiste. En 2014, les hôpitaux et les médecins français ne seront pas prêts à assumer 70 000 habitants supplémentaires. En 2014, les élus n'auront pas préparé de solutions alternatives comme une réouverture temporaire du choix du pays. En 2014, ou six mois plus tard peut être, les frontaliers comprendront qu'ils ont été trahis autant par le groupement des frontaliers que par ces élus irresponsables. Ces positions du groupement des frontaliers défendant ce qui est un privilège contribue à exacerber les tensions entre frontaliers et salariés en euros.

Le plus frappant c'est que cela n'a pas pesé le moins du monde sur le vote. Les électeurs n'ont répondu qu'à une seule question : pour ou contre le gouvernement. Alors pourquoi avoir sacrifié l'intérêt général, l'égalité entre les habitants, la préparation de ces échéances pour les frontaliers, l'honnêteté ?

Pour notre part, nous sommes fiers d'avoir su rester honnêtes, francs, sincères et d'avoir défendu autant l'équité entre les habitants que l'intérêt des frontaliers de préparer cette échéance de 2014. Et nous continuerons de défendre cela, parce que dans les temps mouvementés qui s'annoncent pour le pays après ces élections législatives, il y aura besoin de leaders qui savent tenir un cap et des valeurs.

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