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vendredi, 29 avril 2022

Fonds frontaliers, trafic d'influence et élections législatives

Lors des élections législatives de 2017 un certain nombre de maires du canton avaient affirmés publiquement apporter leur soutien à la député sortante par ailleurs conseillère départementale. L'un de ces élus avait même affirmé en privé que ce soutien était fictif mais destiné uniquement à s'assurer de l'obtention d'une subvention dans le cadre du Fond Départemental de Développement des Territoires (financé par les fonds frontaliers).

L'attribution des subventions aux communes avait été annoncée le 19 juin 2017, soit précisément le lendemain de l'élection législative. Des projets d'écoles étaient subventionnés pour les communes dont les maires avaient soutenu la candidate, mais refusés pour les autres communes. Les premiers obtenaient en moyenne des subventions très supérieures aux autres. La corrélation statistique entre subventions et soutiens était si forte que le hasard ne pourrait l'expliquer qu'une fois par millénaire : une probabilité équivalente à un tsunami lacustre en Haute-Savoie. Une nouvelle corrélation aussi exceptionnelle à 5 ans d'écart, au moment des législatives, ne pourrait plus être liée au seul hasard et constituerai une preuve de trafic d'influence. 

Une telle corrélation entre subventions publiques et soutiens politiques avait suscité l'attention de la presse nationale jusque dans le Canard Enchaîné. Une couverture médiatique qui ridiculisait notre département pour sa gestion publique bananière. L'argent public utilisé à obtenir des soutiens politiques est détourné de la résolution des problèmes de mobilité et de coût de la vie des Haut Savoyards. Le montant est significatif puisqu'il s'agit d'une somme de plus de 2 millions d'euros par an.

Lorsque j'étais élu départemental, j'avais découvert avec stupéfaction que certains collègues appelaient les fonds frontaliers "la boite à sucres" : une expression reprise publiquement dans la presse qui souligne leur mépris des élus locaux en comparant les élus locaux à des caniches qu'on éduque avec des récompenses. Cette expression est une reconnaissance publique de l'existence de ces pratiques pénalement répréhensibles dans notre département.

Suite à cette attribution scandaleuse de subventions, la commune de St Julien avait déposé un recours au tribunal administratif. Par la suite, le département s'était engagé à attribuer des subventions équivalente aux communes lésées mais surtout à fixer des critères équitables indépendants des consciences politiques. Le recours avait été retiré et les communes lésées en 2017 avaient été subventionnées en 2018 et 2019.

Bien sûr, une telle corrélation ne pourra pas se reproduire à l'occasion de ces prochaines élections législatives pour les raisons suivantes :

1) La preuve pourrait désormais être apportée par n'importe quel citoyen devant les autorités compétentes que le hasard seul ne pouvant plus expliquer cette corrélation exceptionnelle, seul le trafic d'influence pourrait le faire - le trafic d'influence est sanctionnée d'une amende jusqu'à 1 million d'euros et de 10 ans de prison tant pour les conseillers départementaux que pour les maires qui en serait coupables. 

2) N'importe quel contribuable de tout le département pourrait reprendre le recours déposé à l'époque par la commune de St Julien pour contester la délibération du conseil départemental devant le tribunal administratif en constatant que les moyens publics en général et les fonds frontaliers en particulier sont utilisés sur des critères partisans plutôt que des critères d'intérêt général en violation du traité de 1973.

3) Au cours des derniers mois j'ai eu de très nombreux échanges avec la Chambre Régionale des Comptes à l'occasion de leur contrôle périodique sur St Julien. Vu la couverture médiatique nationale et l'enjeu de probité de la question de l'affectation des fonds frontaliers, j'ai naturellement évoqué cette question, répondu aux questions sur le sujet, et transmis les documents nécessaires. La Chambre Régionale des Comptes contrôlant régulièrement les départements, le prochain contrôle du département de la Haute-Savoie est imminent. Pour rappel, la Chambre Régionale des Comptes ne manque jamais de remplir son devoir de signaler au procureur tout infraction pénale qu'elle aurait constater. Le nouveau président du Conseil Départemental veillera certainement à ce que sa gestion ne puisse pas être associée à des pratiques pénalement répréhensibles en s'assurant de critères équitables entre communes.

4) Les maires ont pu constater que même les communes dont les élus n'avaient pas soutenu la conseillère départementale avaient pu bénéficier de subventions suite au recours de la commune de St Julien. Ils ont désormais la preuve qu'ils ne sont plus obligés de prétendre soutenir la conseillère départementale et député pour obtenir des subventions départementales.

Les maires du canton de St Julien qui ont déposé des demandes de subventions auprès de leurs conseillers départementaux et qui soutiendraient leur conseillère départementale aux élections législatives se placeraient en situation de conflit d'intérêt. Ce serait un risque pénal inutile dès lors que la commune de St Julien a prouvé par son recours en 2017 que la loi protège les communes dont les maires n'ont pas pris part au débat des législatives. Ce serait également un risque électoral, car leurs habitants qui ont majoritairement soutenu la majorité présidentielle ne comprendraient pas ce soutien à une parlementaire qui s'est illustrée par son opposition systématique : elle n'a jamais voté aucun budget et n'a voté que 35,7% des propositions du gouvernement. Ceux qui avaient l'intention de le faire, y réfléchiront certainement à deux fois.

Tout cela est une excellente nouvelle tant pour les maires qui retrouvent ainsi leur liberté de conscience que pour les citoyens qui pourront désormais s'assurer que les moyens publics sont utilisés sur des critères d'intérêt général pour résoudre nos problèmes communs et pas de copinage partisan. C'est en rompant avec le clientélisme que les aménagements nécessaires à tous à Archamps et à Neydens ont pu être réalisés et que les financements nécessaires à l'entrée ouest de St Julien, le tram et le projet malheureusement abandonné de diffuseur de Viry ont pu être sécurisés lorsque j'étais élus départemental en seulement 4 ans.

A l'avenir il est souhaitable que tous les élus communaux soient régulièrement consultés sur les débats législatifs. Lorsque j'étais élu départemental, j'adressais chaque année un questionnaire à tous les élus municipaux afin de leur demander leur point de vue sur les investissements publics qui leur semblaient prioritaires. Cette implication des conseillers municipaux dans l'attribution des subventions a été malheureusement abandonnée par la conseillère départementale et député.

Mon expérience départementale m'a conduit à observer que la Haute-Savoie peut faire beaucoup mieux en matière de probité et de saine utilisation des moyens publics considérables dont elle dispose. Le clientélisme qui a court a favorisé l'émergence d'un vote extrémiste. Alors que l'extrême droite et l'extrême gauche menacent de bloquer les institutions législatives, il est grand temps de mettre fin à ces pratiques d'un autre temps.

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