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jeudi, 21 avril 2011

Le centre mérite qu'on se batte à le défendre

Dans notre petit bout de territoire frontalier on est frappé par le parallélisme des évolutions idéologiques de part et d'autre de la frontière.

De part et d'autre de la frontière on observe la lente dérive de la droite vers l'extrême droite, le conservatisme idéologique d'une gauche archaïque et au milieu un centre à l'abandon paralysé à l'idée de défendre ses valeurs et qui se mure dans un mutisme qui le condamne. Ce mutisme du centre est d'autant plus incompréhensible que les postures des idéologues sectaires font de la politique un simple jeu de rôles duquel plus aucun compromis n'émerge au service des habitants : la question du logement à Genève en est une caricature. Paradoxalement, au fur et à mesure que le centre renonce à se faire entendre, il devient chaque jour plus nécessaire au débat public.

En Haute-Savoie, il fut un temps où le centre contrôlait tout, décidait de tout. Dans les cartes électorales françaises, la Haute-Savoie était au centrisme ce qu'un phare est au marin : un rocher insubmersible qu'aucune tempête ne pouvait menacer. Mais d'alliances en compromis(sions), le Centre a cédé des villes, des cantons et des circonscriptions les unes après les autres, jusqu'à devenir marginal. Le Centre a perdu la guerre électorale à force de ne pas oser livrer de batailles. Si l'on met de côté les transmissions de fiefs et les "successions" organisées, le résultat des élections cantonales à St Julien est la première conquête électorale d'un centriste en Haute-Savoie depuis plusieurs décennies. Cette conquête doit en inspirer d'autres pour que ce ne soit que le début d'un vaste renouveau du centre si nécessaire à notre département et notre pays.

Il a fallu 5 défaites. Pas totalement des défaites : on a perdu des élections mais nous n'avons jamais perdu de campagnes. Elections après élections nous avons défendu nos valeurs, convaincu des électeurs supplémentaires. Nous avons réinstaller un centre qui ne s'affirmait plus de manière autonome depuis les législatives de 1978.

Après 30 ans d'alliances avec la droite, plus personne ne comprenait vraiment ce qui différenciait le centre de la droite. Petit à petit, le centre avait perdu son identité pour devenir une simple "droite light". Une droite light incapable de fédérer des pragmatiques de gauche et pas franchement passionante pour des pragmatiques de droite. Seuls les vrais centristes votaient encore pour cette droite light, mais nous étions incapables de fédérer au délà de nos propres rangs pour construire une majorité.

Il a fallu le courage de perdre pour affirmer nos valeurs. Le courage d'affirmer nos valeurs aux côtés de candidats de droite et de candidats de gauche d'abord aux élections cantonales de 2004, puis aux législatives de 2007. Les choses ont commencé à changé à ce moment là : un centriste qui se présente face à un sortant de droite devenait alors une option sérieuse pour des pragmatiques de centre gauche.

Mais le véritable déclencheur a été les élections municipales. Nous avons présenté une liste ouverte aux côtés de candidats UMP et de candidats PS. Là encore nous affirmions que le centre était aussi au centre qu'une tête sur les épaules ! Les masques sont tombés au second tour lorsque le PS et l'UMP ont conclut un accord par lequel le candidat UMP apportait son soutien au maire sortant PS par toutes sortes de moyens dont les plus déloyaux.

Cette alliance du PS et de l'UMP au second tour étonne les personnes qui croient encore au clivage droite/gauche. Il n'étonne pas ceux qui ont compris que le véritable clivage de la vie politique est celui des pragmatiques contre les idéologues. Une ligne de fracture qui tôt ou tard divisera en deux la droite aussi bien que la gauche. En s'alliant au second tour des élections municipales, l'UMP et le PS ont réussi à préserver leur duopôles pour quelques années mais ont révélé que le clivage gauche/droite n'est plus qu'un mythe.

Aux élections cantonales, l'UMP et le PS se sont effondrés : l'UMP arrivait 5ième avec 12,25% des voix et le PS 6ième avec 10,46%. Il avait fallu 5 défaites pour affirmer les valeurs du centre, du pragmatisme. Il avait fallu 5 défaites pour reconstruire l'identité d'un centre indépendant capable de fédérer au delà du centre. N'étant pas à droite nous devenions à nouveau un choix pour des pragmatiques de gauche, n'étant pas à gauche nous étions également un choix pour des pragmatiques de droite.

Tout celà n'a été possible que par un travail de terrain acharné et persévérant sur la durée : 360 000 documents distribués dans les boites aux lettres à quelques uns sur les 7 dernières années, des milliers de kilomètres parcourus à pied, à vélo et en voiture, des milliers de portes auxquelles nous avons frappé, près d'un millier de notes rédigées sur ce blog, des milliers de courriers, des milliers d'heures de travail, de débat, de réflection d'affichage et de tractage. Un travail tellement titanesque que j'ai du mal à comprendre comment nous en avons été capables... un peu comme quand on a gravit une montagne et qu'on se retourne : il suffit de mettre un pied devant l'autre et de recommencer.

Je crois que les valeurs du centre méritent qu'on ait le courage de se battre à les défendre. De cette expérience, je retiens que le centre doit être capable de travailler avec tous les pragmatiques en veillant à le faire de manière équitable pour ne pas y perdre son identité propre.

10:16 Publié dans L'engagement | Commentaires (9) | |  Facebook | |  Imprimer | |

Commentaires

Quelle ténacité, quelle persévérance, quelle foi en tes convictions ! je suis heureuse d'avoir cru en toi, de t'avoir soutenu à mon petit niveau, et tu me permets aujourd'hui de penser qu'en faisant confiance en ses valeurs et en son coeur, on peut y arriver...
très belle journée et bonne Pâques...

Écrit par : pascalou74 | jeudi, 21 avril 2011

J'ai suivi et commenté pour le DL l'époque où les centristes ont fait élire Gaston Maurel (PS) aux cantonales à l'occasion d'une triangulaire pour barer la route à Pierre Mazeaud (RPR) "l'ennemi intime du centre" qui avait aussi ses défauts.
. Toute cette "cuisine" éléctorale où les convictions profondes s'effacent souvent au profit de "guéguères" personnelles sur fond d'alliances contre nature n'ont rien d'honorables. Permettez moi d'être pour le moins dubitatif quant aux convictions réelles des uns et des autres. La démocratie est ainsi faite, imparfaite mais il est vrai qu' heureusement qu'elle existe. Mais alors, de grace, un peu moins de grandiloquence.

Écrit par : CAUSSE Michel | jeudi, 21 avril 2011

@Michel Causse :

Merci pour cette remarque. Selon vous entre Pierre Mazeaud et Gastin Maurel lequel des deux était le plus pragmatique et lequel était le plus dogmatique ? Je n'ai connu ni l'un ni l'autre mais ai beaucoup entendu parlé d'eux. Si j'en crois toutes les personnes qui ont soutenu Mazeaud, l'on aidé ou ont travaillé avec lui... avant de se fâcher, et les échos que j'ai de l'action de Gaston Maurel, il semble que les centristes de l'époque ont eu du flair de choisir le moins dogmatique des deux. Peut être qu'il aurait été préférable qu'ils aient eu un candidat encore plus pragmatique ?

Cordialement,

Antoine Vielliard

Écrit par : Antoine Vielliard (Saint Julien en Genevois) | samedi, 23 avril 2011

Salut Antoine,
Un grand bravo à toi et ton équipe pour cette belle réussite.
Le travail a payé par ici aussi puisque j'ai été élu dans la Somme. Je te remercie de tes encouragements depuis une certaine campagne interne des jeunes udf (2006!) et aussi tes bons conseils en université d'été - j'avais écouté avec beaucoup d'attention ton atelier sur comment mener une bonne campagne locale. En plus d'être un bon candidat de terrain, tu es donc aussi un excellent pédagogue !!!
amitiés,
JC Loric

Écrit par : Jc Loric | mercredi, 27 avril 2011

Salut Jean-Christophe,

Excellente nouvelle ! Félicitations à toi. C'est sympa de ta part de prétendre que j'ai pu modestement y contribuer.. alors que c'est avant tout ton travail de terrain à l'écoute des habitants qui a compté.

J'ai vu que tu as été élu en bon centriste fier de nos valeurs : alors qu'il y avait des candidats de gauche et un candidat de droite ! C'est bien pour l'avenir. J'observe que le clivage droite gauche commence à s'effriter et va bientôt faire apparaitre le vrai clivage de la vie politique en Europe : les pragmatiques et les dogmatiques.

Ce matin, Michel Mercier était de passage à St Julien pour l'inauguration d'une maison de la justice et du droit dans la commune. Il avait l'air étonné de me trouver là.. encore plus étonné de me voir élu.. et à voir sa réaction incrédule, il doit encore se demander comment on a pu faire pour être élu en affirmant nos valeurs du centre.. sans demander la permission à d'autres. Ca nécessite simplement beaucoup plus de travail de terrain à l'écoute des habitants.

Amicalement,

Antoine

Écrit par : Antoine Vielliard (Saint Julien en Genevois) | jeudi, 28 avril 2011

c'est vrai que depuis le temps que vous courriez après cette victoire, on peut dire que cette fois elle est plutôt belle

Apres, ce n'est peut etre que moi mais il y a deux raisons qui expliquent la disparition du centre

Déja, le centre à la base représentait plus la démocratie chrétienne. Or, qui serait encore près à voter démocrate chrétient aujourd'hui en France?

Et puis, les français sont trop habitué a etre partagés entre gaullistes et socialistes depuis la création de la Veme République. Il faudrait que peu à peu les centristes, en effet, s'émancipent de ces deux courants en réalisant un travail de terrain local pour regagner de voix petit à petit. Ce que peu d'hommes politiques sont près à faire. Et là vous pouvez vous poser en exemple

Le probleme aussi c'est savoir quelle idéologie défendre aujourd'hui en étant au centre. Parce que partir des radicaux en passant par le modem (mixture de démocrates chrétiens et de socialistes il me semble) jusqu'à CAP 21, il est urgent de se définir une ligne politique claire. Peut etre avec une union de tous ces mouvements ?

Écrit par : thibaut | samedi, 30 avril 2011

Juste pour rire Antoine, je viens d'apprendre que tu es à gauche tout comme moi... Ce n'est pas ma vision des choses ni la tienne mais cela montre encore une fois la médiocrité des analyses de la droite locale. Bon courage pour la suite.
http://www.jp-benoist.fr/index.php?post/2011/03/28/La-soupe-grimace-moins-qu-au-premier-tour%2C

Écrit par : Guillaume Mathelier | dimanche, 01 mai 2011

L'analyse de Benoist est d'autant plus risible qu'Etallaz a d'une part été battu sur l'engagement politique d'A.Vielliard, tout comme A.Vielliard avait été battu grace à la famille Bouchet aux municipales, il me semble que la défaite d'Etallaz est plus imputable aux memes Bouchet plutôt qu'au maire d'Archamps.
Le père Birraud devrait faire gaffe à la famille Bouchet, le petit suppléant est tellement colère contre le vieux Claude.

Écrit par : BUS | lundi, 02 mai 2011

@Guillaume Mathelier :

Merci pour l'information... effectivement, il y a encore beaucoup de gens qui ont du mal à comprendre que le centre est au centre. L'expression centre-droit n'est qu'un oxymore comme l'est l'expression centre-gauche.

Notre pays a besoin d'un centre fort et d'un centre pillier qui puisse fédérer autant les pragmatiques de droite exaspérés d'être encore sous la houlette des dogmatiques nationalistes ou des ultralibéraux que les pragmatiques de gauche tout autant exaspérés d'être encore dépendants d'une gauche archaïque et dogmatique qui rejette l'économie de marché plutôt que de travailler à la réguler ou d'une gauche de principe qui s'ennorgueillit de valeurs et de grandes théories et se montre souvent incapable de les mettre en pratique.

Quand je constate qu'il a fallu que St Julien ait son premier maire de gauche pour inaugurer la première décennie de baisse dans le nombre de nouveaux logements sociaux construits.. je me dis que le centre pour être plus pragmatique est plus à gauche que la gauche. Quand je constate l'explosion des déficits publics du gouvernement de droite avant même la crise, je me dis que le centre est plus à droite que la droite. Tout simplement parce qu'avec du pragmatisme on peut faire plus que la gauche dans le social et plus que la droite dans la rigueur de la gestion et le développement de l'économie et des emplois.

Pour tous ceux qui ont du mal à comprendre le positionnement du centre, qu'ils observent leur main droite : elle est à droite. Puis leur main gauche : elle est à gauche.. qu'ils se posent ensuite la question de savoir si leur tête est à droite ou à gauche ?

Bien cordialement,

Antoine Vielliard

Écrit par : Antoine Vielliard (Saint Julien en Genevois) | lundi, 02 mai 2011

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